
L’avis réservé de la commission d’enquête publique sur le projet de BHNS (Bus à Haut Niveau de Service) ne peut pas être interprété comme un blanc-seing. Ce n’est pas un feu vert politique. C’est un feu orange clignotant : un signal d’alerte, une invitation à la prudence, à la révision du projet, et surtout, à plus de respect envers les habitants de la métropole.
Car les critiques sont nombreuses, structurantes et préoccupantes : tracé flou, absence d’analyse comparative, absence de plan de déplacement métropolitain, pas de concertation réelle, motorisation partiellement thermique… Autant de failles soulignées aussi bien par la commission d’enquête que par l’Autorité Environnementale.
Et pendant ce temps, que fait la Métropole ? Elle poursuit tête baissée, brandissant la promesse d’une subvention de 40 millions d’euros de l’État comme justification ultime. Depuis quand une subvention remplace-t-elle une vision d’aménagement ?
20 ans de renoncements et d’argent gaspillé
Le projet initial de tramway avait été porté dès les années 2000. Prévu pour 2004, il a été officiellement abandonné en 2005, mais jamais remplacé par une alternative crédible. On a changé de nom (TCSP, superbus, BHNS…), mais jamais de méthode : l’opacité, les effets d’annonce, et les choix techniques discutables ont perduré.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
- 200 millions d’euros déjà dépensés pour des études, expropriations, procès, aménagements restés inutilisés.
- 2,27 millions d’euros de condamnation judiciaire à verser à une entreprise évincée.
- Une taxe « versement transport » prélevée sur les entreprises locales, passée de 1 % à 1,75 %, générant 22 millions d’euros par an, soit près de 500 millions d’euros en 20 ans.
Et quel résultat en 2025 ? Rien. Pendant que d’autres métropoles – Nice, Montpellier, Grenoble – avançaient, nous maquillons des bus et enterrons nos ambitions.
Des infrastructures déjà pensées… pour un tram
À La Garde comme ailleurs, des aménagements ont bel et bien été réalisés, mais jamais utilisés :
- Tunnel sous l’avenue du 14 juillet 1789 censé relier La Garde au Pradet : jamais mis en service.
- Double voie sur l’avenue de l’Université : prévue à l’origine pour accueillir le tram.
- Préemptions dans certaines rues (Jean Jaurès, entre autres) : restées sans suite.
Ces ouvrages n’étaient pas des erreurs. Ils étaient les signes d’une ambition cohérente, pensée sous Maurice Delplace et son équipe : un axe structurant de transport traversant une partie de la métropole. Et cette ambition a été abandonnée, sans explication, sans concertation.
À La Garde : des promesses sans retour
La situation gardéenne est tout simplement indéfendable. Notre commune est un contributeur majeur à la fiscalité des transports, notamment via sa zone industrielle. Mais :
- Les travaux du BHNS ne sont pas prévus avant 2037-2038. Autrement dit : notre commune ne verra aucun changement avant plus de 10 ans.
- Le tracé gardéen ne sera même pas en site propre. Les bus circuleront en site partagé avec les voitures, annulant en partie les bénéfices du projet.
- Aucune réunion publique n’a été organisée à La Garde. Aucun accompagnement n’est prévu, ni pour les riverains ni pour les commerces.
- Plusieurs dizaines de parcelles sont concernées par des emprises foncières.
- Aucune étude socio-économique localisée n’a été menée. La ville est traitée comme un point de passage, pas comme une partie prenante.
Pendant ce temps, nos entreprises ont payé pendant 20 ans, et nos habitants auront droit à un superbus en 2038. Et encore : sans voie dédiée.
Tramway et BHNS : complémentaires, pas exclusifs
Contrairement à ce qu’insinuent certains élus, le tramway et le BHNS ne sont pas incompatibles. Dans de nombreuses métropoles françaises (Lyon, Nantes, Strasbourg…), ces deux modes de transport coexistent harmonieusement. Le BHNS peut jouer un rôle utile sur des axes secondaires, mais il ne peut remplacer un tramway sur un axe structurant.
Or ici, on nous impose un seul BHNS pour toute la métropole, comme s’il suffisait à tout régler. C’est une impasse.
Pire encore : le calendrier prévu est absurde. À La Garde, le BHNS n’arriverait qu’en 2038. Il faudra donc 12 à 13 ans pour livrer une ligne de bus, alors que Montpellier ou Le Havre construisent un tramway en 5 à 6 ans. Cherchez l’erreur.
Et que dire des communes oubliées dans le projet ? Le Pradet, Carqueiranne, La Crau, Saint-Mandrier, Le Revest… Elles ne sont ni desservies, ni concertées. C’est une carte tronquée, pas une vision de territoire.
Le BHNS : une fausse bonne idée
Les défenseurs du projet répètent : « C’est mieux que rien. »
Mais cette phrase est le résumé d’une pensée paresseuse. Ce n’est pas mieux que rien. C’est une erreur coûteuse.
Les chiffres sont connus et sourcés (CEREMA, FNAUT, ADEME) :
Critère | Tramway | BHNS |
Motorisation | 100 % électrique | Majoritairement diesel/gaz |
Émissions | Zéro | NOx, particules |
Capacité | Jusqu’à 10 000 passagers/heure | 3 000 à 4 000 passagers/heure |
Durée de vie | 40 ans | 15 à 20 ans |
Site propre | 100 % | Environ 70 % (moins à La Garde) |
Fréquentation | +30 à 50 % vs. bus | Faible attractivité |
Et si l’on prend en compte les 200 millions déjà dépensés, le BHNS revient plus cher qu’un tramway.
Gouverner, ce n’est pas courir après les subventions
Il y a quelques mois, l’ancien préfet du Var avait justifié le lancement de l’enquête publique en expliquant qu’il fallait avancer vite pour ne pas perdre une subvention de 40 millions d’euros de l’État. Cette logique purement comptable en dit long sur l’absence de vision d’ensemble portée par les élus métropolitains.
Mais un projet d’aménagement ne se bâtit pas sur la peur de perdre une subvention. Il se construit sur un besoin, une vision, une cohérence à long terme.
Aujourd’hui, le nouveau préfet hérite d’un dossier vieux de vingt ans, marqué par des promesses non tenues, des arbitrages opaques, et des reculs techniques. Nous lui faisons confiance pour prendre la mesure de l’enjeu démocratique et environnemental que ce projet soulève.
Ce que nous demandons
Nous proposons une autre voie, responsable, structurée, ambitieuse. Nous demandons :
- La suspension immédiate du BHNS tel qu’il est conçu.
- Une étude indépendante et comparative avec le tramway.
- Un plan de déplacements métropolitain global, interconnecté, écologique, transparent.
- La reconnaissance des erreurs passées et le respect des investissements déjà engagés.
Un choix politique, pas technique
Ce projet n’est pas seulement un échec d’ingénierie. C’est un échec politique.
Il traduit l’absence de vision, le manque de courage, et la priorité donnée à la communication sur l’intérêt général.
Mais tout n’est pas perdu. Le tramway, ce n’est pas une lubie du passé. C’est une solution moderne, propre, efficace, adaptée à notre densité urbaine.
Nous ne voulons plus d’une métropole qui triche avec ses propres ambitions.
Nous ne voulons plus d’une ville qui subit.
À La Garde, nous croyons en un avenir structurant, équitable, concerté
Le tramway est possible.
Le tramway est nécessaire.
Le tramway est attendu.
Julia Peironet Brémond
Conseillère municipale à La Garde
Tête de liste « Unis pour La Garde – Municipales 2026 »